Vipeoples.net  | Site d'actualité générale sénégalaise des VIP


LA HAUTE TRAHISION : QUAND LA POLITIQUE VALIDE, LE DROIT BLOQUE.


Rédigé le Samedi 18 Octobre 2025 à 17:17 | Lu 73 fois | 0 commentaire(s)




LA HAUTE TRAHISION : QUAND LA POLITIQUE VALIDE, LE DROIT BLOQUE.
 
 
La Constitution sénégalaise, en son article 101, prévoit que « le Président de la République n’est responsable des actes accomplis dans l’exercice de ses fonctions qu’en cas de haute trahison ». Cette disposition consacre le principe d’une responsabilité pénale du Chef de l’État, sous réserve d’une mise en accusation par l’Assemblée nationale, adoptée à la majorité des trois cinquièmes (3/5).
 
Le droit pénal repose sur un principe fondamental, véritable pilier de l’État de droit : le principe de la légalité des délits et des peines, exprimé par l’adage latin « Nullum crimen, nulla poena sine lege » nul ne peut être poursuivi ou puni pour un fait qui n’était pas défini comme infraction par la loi au moment où il a été commis.
Cependant, ce mécanisme demeure inopérant dans le droit positif sénégalais : ni la Constitution, ni une loi organique, ni le Code Pénal n’ont défini ce que recouvre la haute trahison, ni précisé la nature des sanctions encourues.
 
Ce vide juridique du droit pénal de fond ne peut violer le principe de la légalité des délits et des peines, énoncé à l’article 4 du Code pénal qui est une garantie contre l’arbitraire :
 « Nul crime, nul délit, nulle contravention ne peut être puni de peines qui n’étaient pas prévues par la loi avant qu’ils fussent commis. » 
Ce même principe est consacré par l’article. 8 de la Déclaration des droits de l’homme de 1789 dispose que : « La loi ne peut établir que des peines strictement et évidemment nécessaires et que nul ne peut être puni qu’en vertu d’une loi établie et promulguée antérieurement au délit et légalement appliquée. » Ce principe a donc une valeur constitutionnelle. 
 
Ainsi, une procédure politique de mise en accusation peut être engagée dans les formes, mais aucune poursuite juridiquement valable ne peut prospérer devant la Haute Cour de Justice, faute de base légale.
La recevabilité politique ne garantit donc pas la faisabilité juridique.
Par ailleurs, une éventuelle extradition d’un ancien Président se trouvant à l’étranger apparaît hautement improbable, en raison des considérations diplomatiques et de souveraineté qui entourent ce type de procédure.
 
La loi organique relative au fonctionnement de la Haute Cour de Justice prévoit, en son article 36, qu’en matière criminelle, l’accusé non comparant est jugé selon les règles de la contumace, telles que prévues par les articles 307 et suivants du Code de Procédure Pénale. 
En définitive, cette démarche relève davantage d’une volonté symbolique de redevabilité politique que d’une procédure judiciaire susceptible d’aboutir et tant que la haute trahison ne sera pas définie par la loi, la poursuite d’un ancien Chef d’État restera une fiction constitutionnelle.
 
Comparaison avec le modèle français, en France, le statut Pénal du Président de la République a été modifié par la révision constitutionnelle du 23 février 2007, qui a réaffirmé et clarifié le principe d’irresponsabilité du Président de la République pour les actes accomplis dans l’exercice de ses fonctions avant de poser les limites.
Autrement dit, aucune action pénale, civile ou administrative ne peut être engagée contre lui pour des faits commis en sa qualité de Chef de l’État, y compris après la fin de son mandat.
Cette protection vise à préserver la continuité et la dignité de la fonction présidentielle, et non à conférer une impunité personnelle (Article 67 de la Constitution). 
 
Toutefois, cette irresponsabilité connaît deux exceptions majeures :
- Le Président peut être poursuivi devant la Cour pénale internationale pour crimes de guerre, crimes contre l’humanité ou génocide.
 - Il peut être destitué en cas de manquement grave à ses devoirs, manifestement incompatible avec l’exercice de son mandat. 
S’agissant des actes accomplis en dehors de ses fonctions, le Président bénéficie d’une inviolabilité temporaire pendant la durée de son mandat : aucune procédure pénale, civile ou administrative ne peut être engagée contre lui.
 
Mais cette immunité cesse un (01) mois après la fin du mandat, permettant alors la reprise ou l’ouverture des procédures suspendues durant son exercice du pouvoir.
 
 EL AMATH THIAM : 
Juriste-Consultant, Président Justice Sans Frontière.


Nouveau commentaire :
Facebook Twitter

Les messages jugés choquants seront de suite supprimés


LERAL TV CANAL 33 SENEGAL


Facebook

Publicité





google.com, pub-6479506562269384, DIRECT, f08c47fec0942fa0 smartadserver.com, 1097, DIRECT