Devant le Tribunal correctionnel de Pikine-GuĂ©diawaye, la journaliste et chroniqueuse Maty Sarr Niang a comparu hier pour diffamation commise par moyen de diffusion publique. Poursuivis dans la mĂȘme affaire, son confrĂšre Cheikhou Oumar Talla, animateur sur Feeling Dakar TV, et la chaĂźne elle-mĂȘme, bien quâabsents Ă la barre, encourent Ă©galement une Ă©ventuelle condamnation.
Selon LâObservateur, lâaffaire trouve son origine dans une publication Facebook attribuĂ©e Ă Maty Sarr Niang, affirmant que Lat Diop, ancien directeur gĂ©nĂ©ral de la Loterie nationale sĂ©nĂ©galaise (Lonase), aurait remboursĂ© « 5 milliards de FCfa Ă lâĂtat du SĂ©nĂ©gal » dans le cadre dâune affaire de dĂ©tournement prĂ©sumĂ© de deniers publics, dâextorsion de fonds et de blanchiment de capitaux, laissant « 2 milliards » encore dus. Cette information a Ă©tĂ© jugĂ©e diffamatoire par lâintĂ©ressĂ©, qui avait Ă©tĂ© dĂ©tenu depuis le 26 septembre 2024 dans le cadre dâune enquĂȘte pour dĂ©tournement prĂ©sumĂ© et blanchiment de capitaux, avant dâĂȘtre remis en libertĂ© sous surveillance Ă©lectronique le 6 novembre 2024.
Lâaudience sâest tenue dans une salle presque vide, oĂč Maty Sarr Niang, 41 ans, a reconnu ĂȘtre administratrice de la page incriminĂ©e, tout en niant en ĂȘtre directement lâauteure. Elle a expliquĂ© Ă la barre : « Jâai confiĂ© la gestion de la page Ă deux jeunes, un homme et une femme, depuis que jâĂ©tais en dĂ©tention entre juin 2023 et le 13 mars 2024. Ils avaient accĂšs Ă mes comptes, mes tĂ©lĂ©phones et mes connexions. Ce sont eux qui ont publiĂ© le post Ă mon insu. »
La journaliste a prĂ©cisĂ© quâelle ignorait lâexistence de la publication jusquâĂ sa suppression et a reconnu avoir remis Ă ces deux « community managers » tous ses identifiants, en contrepartie dâune rĂ©munĂ©ration mensuelle de 100 000 FCfa chacun. Cependant, pour la partie civile, les explications de la journaliste ne tiennent pas. Selon lâavocat de Lat Diop, la publication attribuait faussement les propos aux « avocats de Lat Diop » et a circulĂ© largement sur les rĂ©seaux sociaux avant dâĂȘtre reprise par plusieurs mĂ©dias en ligne. « Ces messages ont Ă©tĂ© diffusĂ©s alors que M. Lat Diop Ă©tait en dĂ©tention. Ils visaient clairement Ă manipuler lâopinion publique et Ă salir sa rĂ©putation », a plaidĂ© lâavocat, prĂ©cisant que son client ne rĂ©clame plus 200 millions, mais seulement un franc symbolique Ă titre de rĂ©paration morale.
Le dossier implique Ă©galement Cheikhou Oumar Talla, absent Ă la barre malgrĂ© une citation reçue en personne. Selon LâObservateur, il aurait repris et commentĂ© en direct la publication litigieuse sur sa chaĂźne, allant jusquâĂ dĂ©clarer que « la Lonase Ă©tait gĂ©rĂ©e comme une vache laitiĂšre sous la direction de Lat Diop ». Feeling Dakar TV, citĂ©e comme co-prĂ©venue, est Ă©galement poursuivie pour complicitĂ© de diffusion de propos diffamatoires.
Le procureur de la RĂ©publique a requis lâapplication stricte de la loi, estimant que les faits sont Ă©tablis et que les propos ont Ă©tĂ© largement relayĂ©s dans un but de nuisance. En dĂ©fense, lâavocat de Maty Sarr Niang a plaidĂ© la bonne foi et lâabsence de preuve matĂ©rielle : « Rien ne dĂ©montre que ma cliente est Ă lâorigine de la publication. Elle nâa jamais validĂ© le message, et celui-ci a disparu de sa page. Nous sommes Ă lâĂšre du numĂ©rique, oĂč lâintelligence artificielle et la suppression automatique compliquent la traçabilitĂ©. Lat Diop sâest rĂ©veillĂ© un matin en disant : âMaty Sarr Niang mâa diffamĂ©.â Mais aucune capture, aucun lien, aucune preuve technique nâexiste. »
La dĂ©fense a ainsi sollicitĂ© lâapplication bienveillante de la loi pĂ©nale, tout en appelant Ă une distinction claire entre libertĂ© dâinformer et intention de nuire. Le tribunal a mis lâaffaire en dĂ©libĂ©rĂ© au 9 dĂ©cembre 2025. Maty Sarr Niang, Cheikhou Oumar Talla et la chaĂźne Feeling Dakar TV sauront alors si leurs publications numĂ©riques leur vaudront une condamnation ou la clĂ©mence des juges.
(MOUHALIM INFO)








